Retrouvailles avec Georges Lini dont la mise en scène d’Iphigénie à Splott avait été un véritable uppercut. Il revient avec La sœur de Jésus-Christ, d’Oscar De Summa au Théâtre des Doms. Une traversée narrée du silence et de la colère, une fable contemporaine sur la violence sexiste dans un cadre villageois stylisé. Un seul en scène sublime qui continuera de rendre hommage et de faire exister ce talentueux metteur en scène malheureusement décédé pendant le Festival OFF d’Avignon.

Ne vous fiez pas au titre de la pièce. Il ne sera pas question de religion. Mais de l’histoire d’une jeune femme. De l’histoire de la violence, de la honte et de celle, qui, forcée et humiliée, décidera de se venger.
Maria vit dans le sud de l’Italie avec ses parents, sa grand-mère et son frère, surnommé Jésus-Christ. Un jour, elle s’empare du pistolet Smith & Wesson 9 mm qui végète dans le buffet, vérifie qu’il est chargé et quitte la maison. D’un pas sûr, arme à la main, elle marche vers Angelo le Couillon. Que va-t-elle y faire ? La construction maîtrisée tient en haleine avec une trame narrative originale pleine d’humour et de cocasserie. Oscar De Summa fait du voyage initiatique de Maria un matériau dramatique. L’auteur s’interroge sur la violence qui sommeille en chacun et le corps des femmes, à la fois enjeu privé et public, enjeu de pouvoir. Un western poétique et politique où Maria avance inébranlable, tandis que se déroule autour d’elle une fresque collective, rude, drôle et tragique à la fois.
Elle avance pour reconquérir sa dignité. Autour d’elle, son petit village italien est secoué et ébranlé par ce qui se joue. Les femmes du village se mobilisent car c’est aussi une histoire de femmes et de sororité pour refuser la violence et pour incarner la génération du changement, celle qui refuse de se taire.
Seul comédien sur scène, Félix Vannoorenberghe se positionne comme le narrateur, le passeur effréné de ce western haletant au suspens terrifiant. Il illustre la trentaine de personnages qu’il évoque avec des costumes suspendus sur des cintres en fond de scène. Une manière astucieuse et forte de créer visuellement tout un groupe de personnes. Les costumes se multiplient au fur et à mesure que la tension monte. La mobilisation se ressent de plus en plus, soutenue par la musique en live de Florence Sauveur qui accompagne avec douceur et crainte ce récit épique qui bouleverse.