Palpitante aventure humaine et artistique, dont la force symbolique est marquée par le choix du metteur en scène Robert Cantarella, accompagné de Florence Giorgetti, Judith Magre et Edith Scob. Vingt-six années plus tard, il remonte Inventaires, de Minyana, au Théâtre de Poche Montparnasse, avec les trois mêmes comédiennes qui, jadis, avaient déjà illuminé le Théâtre de la Bastille. Leurs silhouettes ont vieillies, leurs visions du monde ont du bien évoluer, mais elle se battent toujours avec autant de conviction pour rendre hommage au théâtre.
Le partage est à l’honneur, entre elles, mais aussi avec un public qui, trop ravi de les retrouver, se donne des allures de café-théâtre, en se laissant aller aux commentaires et à la chansonnette. Outre cet aspect carnavalesque, encouragé donc désiré par les comédiennes, notre attention est focalisée, hypnotisée, par la scène qu’elles habillent de leurs paroles. Tentative délicate que celle de créer une cohésion et une unité dramatique lorsque le texte impose une absence totale de dialogues.
Malgré cette difficulté, une complicité unie plus que jamais les trois femmes qui nous font l’émouvant inventaire de leurs vies respectives. Angèle, Jacqueline et Barbara sont ces personnages si chers à l’univers de Minyana. Des êtres souvent mis à l’écart d’une société dans laquelle ils tentent de survivre, parfois marginalement. Le discours est touchant mais loin d’être larmoyant car toujours empreint d’une douce et frivole nostalgie. Il faut parler, mais pour exister aux yeux de qui et dans quel but?
Malgré l’écriture complexe de l’auteur dont le style est particulier car dénué de ponctuation, les comédiennes se sont appropriées les récits bouleversants de ces trois souffles atypiques. Incarnant à merveille leurs personnages, elles parviennent à capter l’attention du spectateur qui est impatient d’en apprendre davantage sur leur passé. Toujours dans une énergie et une vitalité sans relâche, chacune avec leurs personnalités, leurs intonations et leurs couleurs, nous fait sourire et nous touche, parfois en plein cœur. La voix suave et sensuelle de Florence Giorgetti nous amuse, la mélancolie dynamique qui s’empare de Judith Magre nous bouleverse, quant à Edith Scob, elle manie avec virtuosité et recul l’émotion et la froideur.
Certes la scénographie reste kitch et dépassée, mais la mise en scène apparait juste dans toute sa simplicité. Regrettable que ce décor de pacotille pointe le bout de son nez alors que nous suffisaient le charisme et le talent inébranlables de ces trois femmes, que le temps a marqué tout en nourrissant abondamment leur jardin secret.
Théâtre de Poche-Montparnasse
Inventaires, de Philippe Minyana, mise en scène de Robert Cantarella
Avec Florence Giorgetti, Judith Magre, Édith Scob, Robert Cantarella ou Michel Froehli
Jusqu’au 30 avril 2013
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