Avant la terreur, inspiré de Shakespeare par Vincent Macaigne au Théâtre de la Colline

Six ans après sa dernière création Vincent Macaigne présente son nouveau spectacle Avant la terreur, inspiré de Richard III au Théâtre de la Colline. Des airs de Shakespeare sur fond de sociétés malades et de pourritures humaines. Une œuvre tonitruante, mi pétard mi cotillon. Une bataille pour la vérité face à des luttes empoisonnées.

@Simon Gosselin

Vincent Macaigne s’inspire donc de Richard III de Shakespeare qui relate des histoires de sang toujours d’actualité. L’écriture du dramaturge anglais se mêle à celle de Zweig, de Mallarmé et de Vincent Macaigne pour composer une partition qui balaie et mêle avec agilité de nombreux styles.

Le metteur en scène met en lumière la machine infernale dont Richard III fait partie en insistant sur son cercle intime et familial qui contribue au déséquilibre et à la sauvagerie des évènements.

Chez Shakespeare l’image ultime du pouvoir est représentée par la couronne. Chez Macaigne chacun lutte pour le pouvoir. L’humanité semble contrariée et les rois maudits. Il est impossible d’échapper à la condition humaine. Richard III est incapable de s’entourer de relations équiilibrées. La négociation et la paix ne peuvent pas exister dans un monde venimeux et gangréné. Les monstres qui sommeillent en chacun règlent alors leurs conflits dans le sang.

Que ce soit au Royaume d’Angleterre au XIVe ou en Ukraine au 21e siècle, le monde s’arme et assassine. Que ce soit à la cour de la Reine d’Angleterre, à la Maison Blanche ou au Palais Chigi à Rome, la bouffonnerie et l’idiotie règnent. Complots, meurtres, parjures et trahisons traversent les hommes.

Les images, les rumeurs et le divertissement bercent nos sociétés malades d’ignorance et d’endoctrinement. Avant la terreur fait un parallèle éloquent et brûlant d’actualité entre deux époques qui semblent pourtant toujours autant déséquilibrées et brutales. Seule la nouvelle génération, la jeunesse, à laquelle le monde a si peu à offrir, semble être la clé de l’union et du pardon.

@Simon Gosselin

Une fois de plus Vincent Macaigne marque avec fracas et fureur le paysage dramatique français. Chacune de ses pièces créait l’évènement et rappelle la nécessité et le plaisir de renouer avec le spectaculaire. Le metteur en scène reste fidèle à d’impressionnants effets esthétiques qui contribuent au burlesque et à la bouffonnerie du spectacle. Serpentins qui tombent du plafond, confettis qui recouvrent le sol, sang qui coule à flots sur le sol boueux et humide du plateau du Théâtre de la Colline.

Systématiquement dans la surenchère et la provocation, la pièce n’en demeure pas moins poétique et bouleversante.

Les spectacles de Vincent Macaigne se vivent intensément. La fin du monde peut alors advenir. Les comédiens interviennent dans le public. Les spectateurs descendent sur le plateau pour une danse endiablée sur de l’électro. Le metteur en scène titille le spectateur, il le chahute et donne au spectacle tout le vivant qu’il revendique. Yolo !

@Simon Gosselin

Comme à son habitude Vincent Macaigne s’entoure d’une tribu de comédiens et de comédiennes remarquables. Autant capables de moments de beauté suspendus que de la grossièreté et la bêtise la plus brutale. Fidèle Pascal Rénéric, Richard III moins difforme qu’il n’y paraît. Brute délicieusement malaisante et naïve aux allures de Joker. Sharif Andoura est un Georges qui jongle avec brio entre premier degrés hilarant et barbarie. Vincent Macaigne offre aux femmes de ce royaume davantage de poids. Emancipées, puissantes, courageuses, craintes et souvent offensées, Candice Bouchet, Pauline Lorillard et Sofia Teillet les font rayonner.

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