Assimilée depuis cet été au rôle de la jeune première caricaturale, à la limite de l’inaudible, dans La Mouette, d’Arthur Nauzyciel, Marie-Sophie Ferdane et la Troupe de la Comédie-Française, illuminent le plateau du Théâtre de l’Avant-Seine. La Maladie de la famille M, c’est le reflet d’êtres liés les uns aux autres, mais pourtant si seuls face à la vie. Par obligation naturelle, les liens du sang sont plus forts que tout. On s’aime sans forcément se comprendre et ne jamais se trouver. On éjecte des mots d’amour pour se rassurer et maintenir une cohérence, mais au final il s’agit bien ici d’une mécanique égoïste, visant à se sentir en sécurité, au-delà d’un besoin sincère d’expression aux autres. La famille que l’on découvre, tente de rester souder face au drame du passé et au silence effrayant d’un avenir fataliste. Comment parvenir à percer l’autre et à l’atteindre sincèrement ? Les personnages semblent emmurés dans un schéma sans issus, où la seule lumière serait la fuite vers une liberté, loin des siens et de ses racines.
Metteur en scène de son propre texte, Fausto Paravidino parvient à créer une atmosphère brute et simple, représentative du manque de chaleur et de saveur humaine. Le décor est sobre et épuré, doté de plusieurs touches poétiques qui installent une forme de monotonie et de lassitude de l’être. Spectateurs de leur destin qui leur échappe, les personnages évoluent dans un intérieur dénué de toute marque d’attachement, aucune trace d’intimité n’est visible, comme si ils n’étaient que de passage dans ce lieu, à cette heure. Cette prison intime dans laquelle chacun tente de survivre et de comprendre l’autre, n’est pas sans nous rappeler l’ombre d’un Oncle Vania, qui face à l’incompréhension de l’autre, est hanté par le drame d’une solitude éternelle. Les comédiens donnent corps et sens au texte et parviennent même, de par un jeu éloquent, aux intonations variées, à masquer quelques-unes de ses faiblesses, comme la présence du médecin qui s’immisce sans intérêt dans cette prison familiale.
Miroir d’une société glaciale, dans laquelle chacun essaye de se rattacher à l’autre comme il le peut, cette pièce est représentative du cruel manque de communication et de liens, dont souffre notre monde et notre cœur. L’amour c’est pourtant parvenir à partager au-delà du conventionnel, c’est réussir à s’ouvrir et se laisser apprivoiser par l’autre. L’autre, cette figure d’étranger que nous dépeint avec talent Fausto Paravidino.
Théâtre de l’Avant-Seine
La Maladie de la famille M, texte et mise en scène de Fausto Paravidino
Avec la Troupe de la Comédie-Française: Christian Blanc, Pierre Louis-Calixte, Marie-Sophie Ferdane, Benjamin Jungers, Suliane Brahim, Nâzim Boudjenah, Pierre Hancisse