Stéphane Braunschweig signe sa première année à L’Odéon Théâtre de L’Europe et s’éloigne des textes contemporains pour monter une des plus célèbres tragédies de William Shakespeare : Macbeth. Nul besoin de moderniser le propos de cette pièce dont les arcanes du pouvoir résonnent et résonneront toujours. Macbeth gravit toutes les strates jusqu’au trône d’Ecosse, semant plus d’une tête sur son passage. Nous assistons aux coulisses sanguinaires d’une montée politique. Politique que nous retrouvons à travers un salon aux dorures et aux moulures qui ne sont pas sans nous rappeler notre Elysée actuel, dans lequel siège notre Président de la République. Du 16e siècle écossais à notre France contemporaine, il n’y a qu’un pas !
Comme à son habitude, Stéphane Braunschweig s’adonne à une scénographie soignée et très visuelle, recelant de découvertes. Entre portes qui s’ouvrent et murs qui s’écartent, les décors se suivent et s’entrechoquent, créant des contrastes entre un salon versaillais et un espace vide recouvert de carrelage blanc, semblable à une boucherie. De cet office, cette cuisine en a déjà tous les accessoires : de nombreux couteaux, qui nous renvoient à la vision du poignard de Macbeth, ornent les murs de sa demeure. Une esthétique et des lumières très travaillées, qui passent de l’univers mystique et violacé des trois sorcières, à l’éclairage blafard de chez les Macbeth. Un tableau attire notre attention, nous rappelant, de par sa forêt de sapins et ses nuances de gris, une scène du Canard Sauvage, d’Ibsen, que le metteur en scène avait monté au Théâtre de la Colline.
Macbeth est interprété par Adama Diop avec un détachement moral flagrant. Stéphane Braunschweig met l’accent sur cet aspect du personnage en interrogeant la notion de responsabilité. Même si les sorcières ont prédit une destinée à Macbeth, elles n’en sont pas responsables. Les hommes se déchargent trop facilement de leurs actes odieux au nom de la fatalité annoncée. Trop de distance, additionnée à une pointe d’humour, déculpabilisent le personnage de Macbeth qui prend trop de hauteur face à la situation. On le sens moins impliqué et concerné que les autres, alors qu’il est celui qui mène cette danse macabre. Sa femme Lady Macbeth, hantée par le sang versé par son époux, est interprétée par Chloé Rejon, qui accuse les coups avec grâce et douleur. Quitté au Festival d’Avignon, à sa sortie du CNSAD, Roman Jean-Elie, fait son entrée sur les planches de L’Odéon. Il incarne avec prestance, Malcolm, déterminé et convaincant. À leurs côtés, nous retrouvons avec plaisir quelques acteurs présents dans la dernière création de Stéphane Braunshweig, Soudain l’été dernier, de Tenessee Williams : Virginie Colemyn, Boutaïna El Fekkak et Glenn Marausse.