Elle brûle, de Mariette Navarro par Caroline Guiela Nguyen

elle brûle« Je n’arrive pas à comprendre. J’aurais aimé pouvoir l’aider, si j’avais vu quelque chose.», Anne Rouault – la cousine d’Emma

Ecrit à partir d’un fait divers, précédé d’un hasard inopportun, Elle brûle, de Mariette Navarro est un hommage à Emma Bauchain, épouse et mère disparue trop tôt. Afin de nous plonger en plein cœur du quotidien de cette famille, Caroline Guiela Nguyen, installe en amont de l’entrée dans la salle du Théâtre de la Colline, une sorte de cabinet de curiosités.

Entourés, de part et d’autres, d’objets, de musique, de souvenirs, de la Famille Bauchain, la metteuse en scène nous entraine au milieu de leur intimité et prolonge, l’espace de quelques instants, la mémoire de celle qui n’est plus. Celle-là même qui a menti pendant des années, sombrant peu à peu dans une folie et un désespoir irréversibles. Les tromperies et les dettes d’argent s’accumulent, Emma perd pied mais fait toujours bonne figure devant les siens. Devant son mari et sa fille, deux aveugles ou deux témoins muets face à sa descente aux enfers. Boutaïna El Fekkak, interprète avec beaucoup de fragilité et de mystère, cette femme instable, aux secrets bien gardés. Très convaincante dans son mensonge qui constitue la réalité qu’elle s’est créée, elle incarne avec conviction, trouble et atrocité, cette déchéance ultime. Quel dommage alors de faire évoluer ces personnages, confrontés à un sujet tellement riche et profond, dans un décor aussi kitsch et réaliste.

L’intérieur de la maison est retranscrit dans les moindres détails, conformes à la réalité d’un foyer sans surprises qui dénature toute la force de l’histoire. Bien que voulant montrer l’horreur au sein de la norme, rien n’est suggéré, tout est évident, nous renvoyant à un réel ennuyeux et dérangeant. Le pouvoir du théâtre ne réside-t’il pas dans l’invention de nouveaux codes ? Nous avons déjà le cinéma pour être confrontés aux minutieux reflets identiques de notre existence. Sans parler de cette reproduction exacte d’un cadre de vie, le plus gênant reste l’esthétisme assez douteux qui envahit ce beau plateau que nous regrettons.

Trop d’artifices, gâchent la dimension psychologique de cette mise en scène et réduisent l’exploration sans fin des méandres d’Emma Bauchain. De plus, certaines scènes répétitives sont trop longues et manquent alors d’intérêt.  De l’intérêt nous en avons pourtant pour l’autre, qu’à la sortie, nous observons différemment.

Théâtre de la Colline

Elle brûle, texte de Mariette, mise en scène de Caroline Guiela Nguyen

Avec Boutaïna El Fekkak, Margaux Fabre, Alexandre Michel, Ruth Nüesch, Jean-Claude Oudoul, Pierric Plathier

Jusqu’au 14 décembre 2013

 

Retrouvez cet article sur l’Huffington Post

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